Alors que la crise haïtienne s’aggrave de jour en jour, affectant non seulement le peuple haïtien mais aussi l’ensemble de la région caribéenne, des discussions se multiplient autour de la tenue d’un sommet international sur Haïti à Aruba. Cette proposition, bien qu’encore non officielle, suscite un intérêt croissant au sein des cercles diplomatiques, en raison de l’urgence d’une réponse collective face à l’effondrement de l’État haïtien.
Depuis plusieurs années, Haïti traverse une crise multidimensionnelle : insécurité endémique, paralysie des institutions, crise humanitaire, déplacements internes massifs et incertitudes politiques. Ces réalités ne sont plus confinées au territoire haïtien. Des vagues migratoires incontrôlées frappent déjà les pays voisins, et plusieurs États caribéens alertent sur les impacts économiques, sociaux et sécuritaires de cette crise prolongée. Aruba, territoire autonome du Royaume des Pays-Bas situé à proximité du continent, apparaît désormais comme un candidat stratégique pour accueillir une conférence internationale visant à mobiliser les efforts en faveur d’Haïti.
La position géographique d’Aruba, sa stabilité politique, ainsi que ses infrastructures modernes, en font un lieu propice pour favoriser une rencontre de haut niveau. Ce territoire dispose d’une certaine neutralité diplomatique, ce qui pourrait faciliter le dialogue entre les acteurs haïtiens, les partenaires régionaux, et les grandes puissances impliquées dans le dossier. Pour Aruba, ce sommet serait aussi une manière de participer activement à la gestion d’une crise régionale qui ne cesse de s’étendre, tout en affirmant son rôle dans l’espace caribéen.
L’idée d’un sommet à Aruba s’inscrit dans un contexte où la communauté internationale cherche à relancer une dynamique d’appui structuré à Haïti. La récente suspension des vols d’Aruba Airlines à destination de Port-au-Prince pour des raisons de sécurité a attiré l’attention sur la gravité de la situation dans la capitale haïtienne. Cette décision, bien que technique, traduit une inquiétude croissante et renforce l’idée qu’une réponse régionale coordonnée est nécessaire.
Un éventuel sommet sur Haïti à Aruba aurait pour objectif de créer un cadre politique, diplomatique et technique autour de plusieurs priorités : soutien au déploiement de la mission multinationale de sécurité initiée par les Nations Unies et pilotée par le Kenya ; appui à l’organisation des élections haïtiennes prévues d’ici fin 2025 ; coordination de l’aide humanitaire d’urgence, notamment en matière de santé, d’alimentation et de déplacement interne ; et mobilisation de financements durables pour la reconstruction institutionnelle et économique du pays.
Les préparatifs d’un tel sommet nécessitent cependant une volonté politique forte et un consensus régional. Des consultations préliminaires auraient déjà eu lieu entre les autorités arubaises, la CARICOM, certains membres du Conseil présidentiel haïtien de transition, et des partenaires internationaux comme les États-Unis, le Canada et l’Union européenne. Toutefois, la réussite d’un tel événement dépendra également de la capacité à inclure la société civile haïtienne et à éviter les erreurs du passé, marquées par des promesses internationales sans effet durable.
Dans un contexte où les mécanismes traditionnels de coopération semblent atteindre leurs limites, Aruba pourrait représenter une nouvelle scène de dialogue pour poser les jalons d’une solution régionale à la crise haïtienne. Si cette initiative venait à se concrétiser, elle symboliserait un tournant dans la mobilisation régionale et internationale en faveur d’Haïti. Elle traduirait également un engagement ferme à ne pas abandonner un pays frère en détresse, et à construire ensemble un avenir de stabilité et de solidarité caribéenne.
Par Gesly Sinvilier