De nos jours, le quotidien du pays est marqué par la terreur des gangs. Tous les jours, un nouveau quartier est tombé, rallongeant la liste des territoires perdus et livrés, tandis que d’autres sont ciblés et menacés par des chefs de gangs. Alors que les citoyens ne savent plus à quel saint se vouer, ils assistent à une guerre de propagandes mise en œuvre par ses dirigeants.
Les campagnes de propagande orchestrées par les autorités haïtiennes ne sont ni subtiles, ni stratégiques. Elles sont bruyantes, désordonnées et, surtout, déconnectées des réalités que vivent les citoyens au quotidien. Des conférences de presse grandiloquentes, des publications sur les réseaux sociaux vantant des actions symboliques, deviennent monnaie courante. Pourtant, sur le terrain, la situation se dégrade. Le peuple ne mange pas les hashtags, ne se soigne pas avec des discours et ne retrouve pas la paix avec des photos de politiciens en gilet pare-balles.
Le contraste entre le discours officiel et la réalité est saisissant. Tandis que les autorités crient victoire pour la reprise temporaire d’un carrefour ou la distribution d’une poignée de sacs de riz, les citoyens, eux, vivent barricadés, dans la peur constante de voir leur quartier être le prochain à tomber. Cette dissonance alimente un sentiment d’abandon et de trahison. Le peuple haitien n’est pas dupe : il reconnaît désormais la mise en scène derrière chaque opération médiatique. Il sait que la propagande ne remplace pas une politique de sécurité cohérente, ni une volonté réelle de changement.
Pire encore, cette propagande devient un outil cynique de consolidation du pouvoir. En construisant un récit alternatif, les dirigeants cherchent à créer une illusion de contrôle, à détourner l’attention, à désamorcer les critiques. Ils manipulent la peur, usent du patriotisme de façade, et accusent ceux qui dénoncent leur inaction d’être des agents de déstabilisation. Le peuple, ainsi, se retrouve piégé entre la violence des gangs et celle, plus insidieuse, d’un État qui le méprise.
L’incapacité à répondre efficacement à la crise sécuritaire est donc masquée par un théâtre politique qui sert d’écran de fumée. Mais cette mascarade ne fait qu’aggraver la crise de légitimité. Car à force de manipuler la vérité, les autorités creusent davantage le gouffre entre l’État et les citoyens. Et dans ce vide laissé par l’inaction, les gangs prospèrent, les communautés s’effondrent, et l’espoir s’éteint peu à peu.
Il est temps que cesse cette stratégie du mensonge permanent. Le pays n’a pas besoin de slogans, mais d’actes. Pas de photos, mais de politiques publiques concrètes. Pas de chefs d’État en représentation, mais de serviteurs du peuple engagés. La vraie guerre à mener n’est pas celle des mots, mais celle de la reconquête de la souveraineté nationale, de la sécurité, de la justice sociale.
Tant que la propagande primera sur l’action, Haïti restera un État en faillite morale. Et ce ne sera pas la faute des gangs seulement, mais de ceux qui, au sommet, auront choisi le mensonge plutôt que le courage.