BOGOTA, Colombie.– Les sanctions imposées par les États-Unis contre le président colombien Gustavo Petro commencent à produire des effets concrets au plus haut niveau de l’État. Selon son avocat, Me Daniel Kovalik, le chef de l’État se trouve désormais dans l’incapacité de percevoir son propre salaire, en raison du gel de ses comptes bancaires et de ses moyens de paiement.
Cette situation découle de l’inscription de Gustavo Petro et de plusieurs membres de son entourage sur la liste Clinton, un registre du département du Trésor américain répertoriant les individus et entités soupçonnés d’entretenir des liens financiers avec le narcotrafic. L’administration américaine reproche notamment au président colombien de ne pas agir suffisamment contre les réseaux de drogue dans son pays.
Un système bancaire paralysé par la pression américaine
En Colombie, une grande partie des transactions bancaires transitent par des systèmes de compensation contrôlés ou validés par des institutions américaines. L’inscription de Petro sur cette liste noire a donc eu un effet immédiat: comptes bancaires gelés, cartes de crédit désactivées, transactions bloquées, même pour le versement de son traitement présidentiel.
«Même être payé en tant que fonctionnaire est désormais difficile», a affirmé son avocat, Me Kovalik, précisant que les sanctions ne touchent pas seulement le président. Son épouse, l’un de ses fils et le ministre de l’Intérieur figurent également sur la liste OFAC, ce qui entraîne le gel de leurs avoirs et l’interdiction de transactions avec toute entité en lien avec les États-Unis.
Un incident diplomatique aux conséquences immédiates
Les effets de ces mesures dépassent la sphère financière. Il y a quelques jours, l’avion présidentiel colombien s’est vu refuser un ravitaillement en Espagne, en raison des restrictions imposées aux appareils associés à des personnalités sanctionnées par Washington.
Pour l’entourage de Gustavo Petro, ces sanctions ont une dimension politique. Elles seraient le signe d’un avertissement adressé par l’administration du président américain Donald Trump aux dirigeants latino-américains qui contesteraient la politique étrangère de Washington.
Une bataille juridique longue et compliquée
Me Daniel Kovalik a annoncé son intention de contester les sanctions, à la fois devant les tribunaux américains et auprès du département du Trésor. Mais il prévient: «Cela va être un processus très long».
L’avocat n’écarte pas non plus une saisine d’instances juridiques colombiennes ou internationales. Toutefois, il reconnaît les limites de ces démarches. «Soyons réalistes: les États-Unis ne répondent à personne», a-t-il déclaré.
«Gustavo Petro est innocent. Je le connais depuis vingt ans. Il a combattu les cartels tout au long de sa carrière politique. La vérité finira par triompher», a-t-il soutenu.
Cette affaire soulève désormais une question plus large: que se passe-t-il lorsqu’un président en exercice se retrouve privé d’accès au système financier international?
Si la situation devait perdurer, elle pourrait créer un précédent diplomatique majeur en Amérique latine et affecter lourdement les relations déjà sensibles entre Bogotá et Washington.
Jean Mapou


