Le gouvernement met le paquet pour célébrer royalement le bicolore. Plus de 300 millions de gourdes, pour une cérémonie de deux heures, dans la ville du Cap-Haïtien. L’État n’est jamais pauvre, il faut faire honneur au drapeau, symbole de l’unité nationale et de souveraineté.
Lorsque le ministre de la Jeunesse a annoncé le budget des festivités, ce 13 mai, au programme hebdomadaire du gouvernement baptisé « Mardi de la Nation », la plupart des journalistes croyait à une hallucination.
Pour justifier le décaissement de cette somme, la ministre a avancé le fait que le gouvernement projette de faire de la fête du drapeau une célébration nationale.
Sommes-nous sérieux ou inconscients?
Pendant que nous dépensons sans compter pour une messe et un simple discours de plus, des Haïtiens souffrent en République voisine. Ils sont chassés, humiliés, alors que revenir sur leur terre natale est d’autant plus dangereux que le supplice des Dominicains.
Des milliers continuent de vivre dans l’indignité du déplacement interne. La vie dans les camps de fortune est devenue infernale. Des institutions publiques continuent d’accumuler des arriérés de salaires.
300 millions c’est un «Caca Harang», qu’est-ce qu’on peut faire avec. Le pays a trop de problèmes, on ferait mieux de faire la fête et hisser notre bicolore pour rappeler au monde entier qui nous avons toujours été.
Pour faire honneur au drapeau, qui en paiera le prix ?
Selon une analyse de l’ancien ministre du commerce Jonas Coffy, le CPT à lui seul coûterait plus de 60 millions de gourdes par mois à l’État haïtien. Des frais pour leur conjoints, deuxième résidence, frais de nourriture, pour les vêtements, sans compter les voyages.
La délégation qui ira au Cap-Haïtien n’aura pas de droits de passage à verser dans les postes de péage installés le long de la route nationale numéro un. Aucune difficulté à faire face à cause de la menace de pénurie de carburant qui pèse sur le pays.
Mais leur déplacement sera assuré par des hélicoptères au frais de la nation, des per diem ou primes de risque seront calculés. Pour tout cela pas même un centime ne sera soustrait des indemnités totales des Conseillers-Présidents.
Faisons ce que savons faire le mieux et les autres peuples ne nous laisseront pas périr
Pendant que nous essayons de supprimer notre propre humanité en niant la réalité qui est la nôtre, le monde continue de progresser dans divers domaines. Mais cela ne nous fait ni chaud ni froid, car le progrès des autres est au final pour nous. Nous n’aurons pas besoin de faire des efforts dans l’agriculture car la République Dominicaine le fait, pas d’investissement dans l’éducation car le Canada le fait, pas besoin de financer des recherches scientifiques, car les États-Unis le font. Nous avions eu le programme Biden, nous en aurons sûrement d’autres… ainsi va la vie en Haïti.
Un jour, il faudra que les choses changent. On pourra éternellement avoir recours à la corruption pour s’enrichir on ne pourra pas toujours dépouiller les caisses de l’État. On ne pourra pas toujours se verser dans le trafic des armes et des munitions, car on peut tout faire avec une arme sauf s’assoir dessus. Les armes, à elles seules, n’ont jamais un pays riche. Ce sont les progrès de la science et le travail impénitent des citoyens qui créent la propriété.
Jean Mapou


