PORT-AU-PRINCE — Ce 25 juin 2025 marque le premier anniversaire du déploiement du premier contingent de policiers kényans en Haïti, dans le cadre de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS). Un an après, l’Ordre des Défenseurs des Droits Humains (ORDEDH) dresse un bilan accablant et exige une réorientation stratégique urgente.
Un bilan sécuritaire alarmant
Selon l’ORDEDH, la MMAS n’a pas réussi à améliorer la situation sécuritaire ; au contraire, elle semble l’avoir aggravée. Des zones précédemment sous contrôle, telles que Solino, Nazon, Champs de Mars, Carrefour-Feuilles, La Chapelle, Kenscoff, la Route de l’Aéroport, Mirebalais et Saut-d’Eau, sont désormais dominées par des gangs armés. Cette expansion territoriale des groupes criminels a entraîné un exacerbé la crise humanitaire.
L’organisation souligne également une recrudescence des homicides depuis l’arrivée de la MMAS, avec plus d’une douzaine de massacres perpétrés en sa présence. Par ailleurs, plus d’une centaine d’institutions étatiques à Port-au-Prince ont été contraintes de se relocaliser en raison de l’insécurité croissante.
Critiques sur la collaboration avec la PNH
L’ORDEDH déplore le manque de coordination entre la MMAS et la Police nationale d’Haïti (PNH). Des hauts gradés de la PNH critiquent l’attitude des forces kényanes, les accusant de passivité face à la violence des gangs. Cette absence de synergie compromet les efforts de rétablissement de l’ordre public et de sécurisation des infrastructures vitales.
Appel à une refonte stratégique
Face à ce constat, l’ORDEDH appelle à une révision en profondeur de la stratégie de la MMAS. L’organisation insiste sur la nécessité d’une collaboration étroite avec la PNH, d’un renforcement des capacités opérationnelles et d’une planification stratégique adaptée aux réalités du terrain. Sans ces ajustements, la mission risque de continuer à échouer dans sa mission de stabilisation du pays.
Du secret professionnel à une communication opaque
L’ORDEDH attire l’attention sur l’attitude opaque du commandement de la mission, en évoquant la mort, dans des circonstances troublantes, d’un policier kényan dans l’Artibonite, dont le corps aurait été retenu par des gangs armés.
«Le fait que les autorités kényanes et haïtiennes aient dû négocier avec des criminels pour récupérer le corps de la victime constitue une humiliation nationale et soulève de sérieuses interrogations quant à la capacité opérationnelle et à l’efficacité réelle de la mission», dénonce l’Ordre, tout en condamnant fermement le silence de la MMAS sur cet épisode. «L’absence de communication autour de cet incident alimente les soupçons et donne l’impression d’un “secret d’État” inavoué», poursuit l’organisation.
L’appel pressant de l’ORDEDH
L’Ordre des Défenseurs des Droits Humains réclame un redressement urgent de la MMAS, avec des missions claires, cohérentes et bien définies. Il exige une transparence totale dans la gestion des ressources allouées à la mission, afin d’éviter tout risque de détournement ou de blanchiment de fonds, et de garantir une utilisation efficiente des moyens disponibles.
L’organisation appelle la communauté internationale à transformer la MMAS en mission officielle de maintien de la paix sous l’égide des Nations Unies, dotée d’un mandat plus robuste, en tenant compte de l’ampleur des défis actuels. Elle souligne que l’échec de la mission incombe également à la communauté internationale, qui persiste à utiliser Haïti comme un laboratoire d’expériences stratégiques souvent inefficaces, voire contre-productives.
«Le peuple haïtien mérite une réponse concrète, sérieuse et durable à la crise sécuritaire — pas des solutions improvisées qui ne font qu’aggraver sa souffrance», conclut l’ORDEDH.