OTTAWA – Les Canadiens ont tranché. Dans un contexte de tensions commerciales croissantes avec les États-Unis, ils ont choisi de faire confiance à l’expérience internationale et au calme rassurant de Mark Carney. L’ancien gouverneur de la Banque du Canada et de la Banque d’Angleterre fait ainsi son entrée à la tête du gouvernement après avoir mené le Parti libéral à une quatrième victoire consécutive, sous un autre gouvernement minoritaire.
Cette victoire est la première pour Carney à titre de chef, mais elle couronne une campagne marquée par une question dominante : qui est le mieux placé pour défendre le Canada face à un Donald Trump revenu sur le devant de la scène politique américaine avec une rhétorique plus agressive que jamais ?
Dans cet affrontement à distance, Pierre Poilièvre et les conservateurs n’ont pas su convaincre les Canadiens d’un océan à l’autre. Leur incapacité à rassurer les Canadiens sur la protection de leurs intérêts économiques semble avoir coûté cher. D’autant plus que le chef conservateur a subi une défaite personnelle retentissante en perdant son propre siège à Carleton, une circonscription qu’il représentait depuis deux décennies.
De l’autre côté, Carney a capitalisé sur son image d’homme d’État, de technocrate aguerri et de négociateur redouté sur la scène internationale. Dès le déclenchement de la campagne, il s’est positionné comme le candidat du sérieux économique et de la stabilité, dominant les sondages sans relâche. Son passage remarqué à la tête d’institutions financières majeures lui a permis de projeter l’image d’un leader, capable de tenir tête à Trump.
Même si les libéraux ne décrochent pas les 172 députés requis pour être majoritaires, ils pourront vraisemblablement compter sur l’appui du Nouveau Parti démocratique pour former le prochain gouvernement. Le Bloc québécois, pour sa part, jouera aussi un rôle déterminant dans cette configuration parlementaire fragmentée. Mais ce sont les gains libéraux au Québec qui auront permis de conserver le pouvoir. Hier soir dans son discours, Mark Carney a promis de protéger la langue française et l’identité québécoise.
La prochaine étape sera cruciale pour Mark Carney, qui devra non seulement former un cabinet solide, mais aussi rassurer les marchés et les Canadiens. Son défi, transformer son aura technocratique en un leadership politique, capable de tenir dans la durée, dans un parlement où chaque vote comptera dans un contexte minoritaire.
Le Canada entre ainsi dans une nouvelle ère : celle d’un premier ministre formé dans les arènes de la finance mondiale, désormais chargé de naviguer dans les eaux troubles de la géopolitique.