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Lire dès l’enfance : une révolution douce pour Haïti

Dans les rues de nos villes, les marchands ambulants crient les prix du riz et de l’huile, les enfants chantent des comptines en courant pieds nus, les klaxons ponctuent la rumeur des jours… Mais où sont les livres ? Où sont les enfants qui, le soir venu, plongent dans des histoires comme dans un rêve éveillé ? En Haïti, lire est encore un luxe – matériel, culturel et parfois même psychologique. Pourtant, développer une culture de lecture dès l’enfance est peut-être l’un des actes les plus révolutionnaires que nous puissions poser. Car un enfant qui lit est un citoyen en devenir, un esprit qui s’ouvre, un futur qui s’écrit.

Lire pour se construire : un droit fondamental

La Journée mondiale du livre et du droit d’auteur, célébrée chaque 23 avril sous l’égide de l’UNESCO, est bien plus qu’un symbole. Elle rappelle au monde que la lecture est un droit fondamental, un socle de l’éducation, de la liberté et de la paix. Mais en Haïti, malgré les efforts de plusieurs institutions, l’accès aux livres reste inégal. Peu d’écoles ont une bibliothèque fonctionnelle. Dans certaines zones rurales, les livres sont plus rares que l’eau potable.

Pourtant, les recherches sont formelles : un enfant exposé tôt à la lecture développe plus de vocabulaire, de logique, d’empathie et de confiance en soi. Selon une étude de l’OCDE, “la fréquence de lecture à domicile à l’âge de 10 ans est l’un des meilleurs prédicteurs de réussite scolaire à 15 ans.” Développer une culture de lecture, ce n’est donc pas faire plaisir aux intellectuels, c’est donner une vraie chance aux enfants de briser le cycle de pauvreté cognitive et sociale.

Créer des rituels de lecture dans les familles, même sans livres

On croit souvent qu’il faut une bibliothèque pleine pour initier un enfant à la lecture. Faux. Il suffit d’un texte et d’une voix. Une chanson traditionnelle, un proverbe haïtien raconté avec émotion, un conte créole transmis par un aîné : tout cela peut devenir une porte d’entrée vers le plaisir de lire. Le ministère de l’Éducation pourrait promouvoir une “minute de lecture créole” dans chaque foyer – un moment court, quotidien, en langue maternelle, où l’on partage une histoire.

Des programmes comme Lekti se lavni ou les caravanes de lecture animées par FOKAL ou Bibliotaptap l’ont déjà montré : quand les enfants entendent des histoires régulièrement, leur curiosité s’éveille, leur vocabulaire s’élargit, leur esprit critique s’affûte. La lecture devient une fête, pas une punition.

L’école comme déclencheur : lire autrement pour apprendre mieux

Les enseignants sont des passeurs de sens. Or, trop souvent, la lecture en classe est réduite à une activité scolaire figée : lecture à haute voix, interrogation, punition en cas d’erreur. Il faut changer cette dynamique. La lecture doit devenir un jeu, un dialogue, une exploration. Pourquoi ne pas intégrer des livres jeunesse haïtiens (comme ceux d’Èvelyne Trouillot, Kettly Mars ou Gary Victor) dans les leçons de créole et de français ? Pourquoi ne pas laisser les enfants choisir leurs livres en début de semaine, les raconter à leurs camarades le vendredi ?

Des ateliers de lecture expressive, des coins lecture dans chaque salle, des concours d’écriture de contes créoles… tout cela est possible, même avec peu de moyens. Ce qu’il faut, c’est une volonté pédagogique, et un accompagnement des maîtres dans cette révolution douce.

Lire, même sans papier : les nouvelles pistes numériques et communautaires

Dans un pays où les infrastructures sont fragiles, le numérique peut jouer un rôle déterminant. Des applications mobiles comme “Library for All”, déjà testées en Haïti, permettent à des enfants d’accéder à des livres jeunesse gratuits sur smartphone, même hors ligne. Les radios communautaires peuvent diffuser des histoires lues chaque soir. Les bibliothèques mobiles, comme Bibliotaptap, peuvent aller à la rencontre des enfants dans les quartiers reculés.

Mais surtout, il faut faire de la lecture un événement social. Pourquoi ne pas organiser une “Sware Lekti” chaque mois dans chaque commune ? Une soirée ouverte, festive, où les enfants, parents, artistes et conteurs lisent ensemble, en créole et en français. La lecture deviendrait alors un acte de lien, d’ancrage et de fierté.

Lire, c’est dire oui à l’avenir

En cette Journée mondiale du livre, que chacun entende cet appel : un enfant qui lit est un enfant qui pense, qui rêve, qui questionne, qui imagine un autre monde. Dans un pays traversé par les crises et les incertitudes, investir dans la lecture, c’est semer les graines de la reconstruction. Ce n’est pas un luxe, c’est une urgence.

Et si chaque famille haïtienne décidait, ce soir, de lire une phrase à son enfant ? Et si chaque école offrait un moment de silence pour que les mots pénètrent les cœurs ? Et si chaque commune faisait de la lecture une fête mensuelle ? Ce serait peut-être le début d’une révolution.

Pas celle du bruit. Mais celle, profonde, d’une nation qui apprend à se lire pour mieux s’écrire.

Manouchecar MASSENAT
Éducatrice

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