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L’impasse d’une grève sans trêve

Tout l’arsenal du travailleur réside dans la rage provoquéechez lui par sa situation de travail. Cette rage constitue une redoutable « arme » quand elle est transformée en grève, l’arme la plus puissante des ouvriers et des travailleurs. Toutefois, son épuisement ou son mauvais usage peut être catastrophique pour les masses ouvrières, comme l’a si bien dit Jacques Roumain dans Gouverneurs de la rosée. « La rage. La rage, avance un personnage, te fait serrer les mâchoires et boucler ta ceinture plus prêt de la peau de ton ventre quand tu as faim. La rage c’est une grande force. Lorsque nous avons fait la huelga [grève] chaque homme s’est aligné, chargé comme un fusil jusqu’à la gueule avec sa rage. La rage, c’était son droit et sa justice. On ne peut rien contre ça. »

Le syndicalisme, la démocratie et la citoyenneté
La participation à la vie sociale ou l’intervention citoyenne ne sont pas des comportements naturels. Même dans le cadre d’une république démocratique, elles se conquièrent et se défendent. Or, La citoyenneté s’use et s’étiole lorsqu’on la néglige. Au contraire, elle se revendique et se développe dès lors qu’on la sollicite et qu’on la cultive. Le syndicalisme est l’un de ces espaces privilégiés de la démocratie et de l’apprentissage de la citoyenneté. Il doit nécessairement se doter d’un cadre de renouvellement. Tout cela justifie un besoin constant de redynamisation du syndicalisme, puisque les valeurs qu’il porte sont toujours en phase avec la réalité contemporaine. En d’autres termes, il vit d’actualité. Il en ressort que le syndicalisme, dans une société dite démocratique, est nécessaire à la cristallisation des revendications des citoyens et travailleurs. Il est un outil de citoyenneté.  

En règle générale, deux perceptions du syndicalismecohabitent et s’enchevêtrent. Symbole d’une force collective, il serait aussi un alignement ou une négation de l’individu. Dès lors, une question fondamentale se pose : pour être fort collectivement, faut-il renoncer à être libre individuellement ?

Les moyens d’action d’un syndicat
Tout syndicat en général dispose divers moyens d’actions pour organiser sa lutte et défendre les intérêts de ses membres. Par exemple, les négociations collectives, la grève, les manifestations, l’assistance juridique, la création de sections syndicales, les actions en justice, etc. Toutes ces actions visent à obtenir des améliorations salariales, des conditions de travail plus favorables et la protection des droits des salariés. Pour conduire ces actions syndicales, les syndicats peuvent lutter séparément, tout comme ils peuvent se fédérer, se confédérer ouse regrouper sous forme de plateforme syndicale. Une plateforme peut être plus ou moins ponctuelle, ou occasionnelle. En ce sens, des syndicats peuvent se constituer en plateforme en vue de renforcer leur force de frappe sur une revendication donnée et, après, se dissocier. De la même manière, ils peuvent se regrouper dans le cadre de leur participation au dialogue social et aux réformes du travail.

Le syndicalisme haïtien et leurs modes d’action
En général, nos syndicats n’ont pas la culture de fédération. Ordinairement, ils se regroupent en plateforme, regroupement sur des revendications occasionnelles ou dans le cadre de leurparticipation aux dialogues sociaux, comme c’est le cas au cours des dernières années. Par exemple, au début de cette année, il a été demandé aux syndicats du secteur éducatif de se regrouper (par sensibilité ou par proximité, peut-être) pour faciliter leur participation au « dialogue social » relancé par le Ministre de l’éducation en poste, Monsieur Augustin Antoine. Ainsi, plusieurs regroupements ont été constitués tels que : le CONEHQ, le SPEH, le CUTRACEPH, etc. Et le « dialogue » a été suivi de négociations collectives. Des accords ont, parait-il, été trouvé après plusieurs séances de discussion tantôt avec les autorités du Ministère de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle (MENFP), tantôt avec le chef du gouvernement et les responsables dudit Ministère. Des engagements ont été pris au niveau du gouvernement à la suite du lancement de la grève générale et illimitée par les plateformes syndicales le 13 janvier 2025. Le 20 janvier 2025, un acte d’engagement a été signé entre le gouvernement et des syndicats d’enseignants, dans lequel figurait, entre autres : régularisation et budgétisation des enseignants en salle de classe qualifiés, paiement des arriérés de salaires, nomination des stagiaires de l’ENS et du CEFEF, l’octroi d’une carte de début de 15 000 gourdes mensuels à tous les agents éducatifs dans un délai raisonnable, etc.

En ce qui concerne les moyens d’action, les syndicats du secteur éducatif comme ceux des autres secteurs, d’ailleurs, ont recouru à très peu de moyens de cette panoplie évoquée plus haut. Le plus souvent, ils se contentent d’organiser des sit-in avec quelques dizaines d’enseignants, donner des conférences de presse, publier des notes de protestation et de contestation, entreprendre des campagnes médiatiques, des actions en contentieux. Ils lancent des mots d’ordre de grève limitée qui sont trop souvent et assez trop rapidement transformés en grève générale et illimitée dans tous les établissements scolaires publics du pays.

Le plus souvent leurs revendications sontremises aux calendes grecques pour diverses raisons :
1) L’éducation n’est pas la priorité de cet État agissant dans l’unique intérêt des impérialistes ;
2) La médiocratie prédomine dans le pays ;
3) Nos dirigeants sont incompétents et obscurantistes ;
4) Notre système éducatif est une industrie de zombification.

En dehors de ces « raisons étatiques » qui entrainent l’inaction de l’État à l’endroit des agents éducatifs en général et des enseignants en particulier, il y a lieu de mentionner aussi quelques problèmes que soulèvent les mots d’ordre de grève des syndicats qui confondent assez souvent le radicalisme et le syndicalisme en matière de grève. Qu’on ne se méprenne pas sur la notion de grève. À la base, une grève n’a rien de subversif.  Mais, si les revendications ne sont pas satisfaites, elle peut être transformée en autre chose – par exemple, en révolte insurrectionnelle voire, dans certain cas, sous la direction d’un vrai parti des travailleurs, en une révolution. Mais on n’en est pas là, en ce qui concerne notre pays. La grève doit être entendue avant tout comme un moyen de pression utilisé par les syndicats pour faire valoir leurs revendications en cas d’échec des négociations et des conflitsavec l’employeur. Elle est garantie par la constitution de la République d’Haïti de 1987 en son article 35.3 : « la liberté syndicale est garantie. Tout travailleur des secteurs privés et publics peut adhérer au syndicat de ses activités professionnelles pour la défense exclusive de ses intérêts de travail ».

La grève étant un corolaire du syndicalisme, cette constitution républicaine reconnait du même coup le droit de grève. L’article 35.5 stipule : « le droit de grève est reconnu dans les limites déterminées par la loi ». Le fonctionnement des syndicats est réglementé par le code du travail haïtien, notamment en ses articles 122 à 128. On y distingue quatre catégories de syndicats :  a) syndicats professionnels, b) syndicats d’entreprise, c) syndicats industriels et d) syndicats mixtes. Nous ne nous intéressons ici qu’à la première catégorie (a). Nous analyserons le cas de la grève générale et illimitée des syndicats enseignants, lancée depuis le 13 janvier2025 en Haïti. Cela fait déjà à peu près 5 mois de grève contre les plus démunis pour exprimer des revendications pour le moins très justes et suffisamment justifiées. Pour quel résultat ? Les résultats se font attendre encore. Entre temps,on assiste au pourrissement de la grève sous les yeux passifsdes syndicats d’enseignants et dans un climat on ne peut plus délétère.

C’est la stagnation et l’inertie la plus totale des plateformes syndicales. Même la journée nationale des enseignants, le 17 mai, n’a pas pu réveiller les syndiqués dans leur sommeil de grévistes. Grève sans trêve, leur seul credo. Sur ces entrefaites, un enseignant du nom de Williamson Saint-fleur a été sauvagement tabassé par des individus en uniforme d’une unité touristique (politour) de la PoliceNationale d’Haïti, le 18 mai 2025, à la cathédrale du Cap-Haitien, en l’occasion du te deum chanté en l’honneur des « autorités étatiques » qui se déambulaient piteusement pour « célébrer » la fête de la création de notre bicolore le 18 mai 1803 à l’Arcahaie. Cet incident répréhensible survient en ce jour-là, soit seulement 48 heures après la célébration de la journée nationale des enseignants. Qu’est-ce qu’on fait (pour reprendre Gaëlle Bien-Aimé) ?

Les forces et les faiblesses des grèves des syndicats enseignants
Si la grève est un moyen de pression traditionnel, utilisé en cas d’échec des négociations ou des conflits avec l’employeur, pour obtenir gain de cause, il ne peut ni être une mesure primordiale, ni une action indéfinie, ni une entreprise d’emblée illimitée. Sa durée doit être graduelle. Le droit de grève étant un droit fondamental à valeur constitutionnelle, nécessite néanmoins d’être concilié avec le principe essentiel de continuité du service public. La grève doit comporter deux éléments cumulatifs :

  • une cessation collective et concertée du travail ;
  • des résultats fixés à atteindre pour la satisfaction de revendications des travailleurs, (comme véritable but). Autrement dit, la grève, par définition, est une cessation de travail concertée et réalisée au sein d’un établissement par un groupe de travailleurs en vue d’obtenir la satisfaction de revendications présentées à leurs employeurs et dont ils font la condition de la reprise du travail.

Les grèves des syndicats d’enseignants respectent-elles tous les préalables. Quelles sont leurs forces et leurs faiblesses ? La légalité, la justesse et la légitimité des revendications enseignantes peuvent constituer les premiers éléments de la force des grèves. Le regroupement des syndicats en plateforme en est un autre élément de force. Le fait d’entrer en grève après avoir participé à des négociations collectives est aussi à considérer comme une force. Néanmoins, plusieurs problèmes se posent tant du point de vue de méthode que du point de vue tactique et stratégique.Ce qui entraine des failles affaiblissantes (et même paralysantes) à la bonne compréhension et aux considération nécessaires aux revendications enseignantes. Du même coup, cela donne lieu à une perception plutôt défavorable aux enseignants.

À entendre parler des gens qui sont sensibles aux revendications enseignantes, on pourra parvenir à répertorier ces quelques remarques faites à l’endroit des syndicats d’enseignants :
a) les syndicats recourent trop rapidement à la grève, faute de ne pas pouvoir organiser autre chose d’envergure ;
b) les syndicats, même en étant un peu plus de trente mille (30 000), ne peuvent pas organiser une manifestation réunissant 5 cents (500) enseignants syndiqués sur une place publique pour une démonstration de force et de se donner de la visibilité ;
c) pour faire la foule, il leur faut le concourt gracieux des élèves. Or, il devait y avoir des organisations spécifiques d’élèves, comme par le passé (au temps de ZEL), car les élèves ont leurs propres intérêts, différents de ceux des enseignants ;
d) les enseignants syndiqués grèvent dans le public et continuent à travailler dans le privé, ce qui crée une iniquitéeffrayante au regard des élèves du secteur public ;
e) les enseignant syndiqués en grève ne mettent pas les pieds dans leur établissement d’affectation. Pourtant, ils en profitent pour vaquer à leurs activités personnelles. (En ma qualité de censeur depuis treize ans, je suis bien placé pour le savoir et le confirmer).
f) l’État paie mieux, nous lui réclamons augmentation, ajustement, alignement salarial, tandis qu’on paie moins bien dans le privé, nous allons travailler gentiment sans grever. Cela ne parait pas juste non plus ;
g) nous grevons sans limites, sans aucun ménagement pour les élèves et leurs parents des couches populaires les plus modestes ;
h) en grevant, nous continuons à percevoir notre salaire régulièrement du trésor public, or après la levée de la grève, nous n’allons pas pouvoir compenser les mois perdus. Il y a là, semble-t-il, un problème d’éthique qui se pose.

Quand c’est une grève de deux ou trois jours, au maximum d’une semaine, on peut envisager une éventuelle compensation. Mais comment compenser six à sept mois de classe dans une année d’à peu près 9 ou 10 mois ? Quel mécanisme va-t-on mettre en place pour réussir le processus enseignement-apprentissage dans un pareil cas ?
i) Nous grevons pendant 7 mois de classe, aucun contenu n’a été enseigné, pourtant nous attendons impatiemment la tenue des examens d’État pour participer à la correction descopies des candidats. Quel apprentissage allons-nous évaluer ? N’est-ce pas là encore un autre problème d’éthique ? Qu’allons-nous faire pour réparer l’irréparable ?

Quand les enseignants sont en panne de la ragesyndicale pour se faire respecter
Le corps des enseignants publics fait face à un tarissement de sa force la plus puissante décrite plus haut en entretenant une grève illimitée, grillée sous leurs yeux. La puissance d’une arme c’est qu’elle soit toujours chargée. Le déchargement totale d’une arme à feu la rend quasiment inutile entre les mains de son détenteur. De la même manière, quand on se précipite à la grève illimitée, on se retrouve désarmé, au point que devant de telles brutalités policières contre un respectable collègue, on n’y peut rien. Nous sommes en panne d’action syndicale comme un guerrier qui a abusé de ses munitions dans l’entrainement ou dans la démonstration fantaisiste et, quand la guerre bat son plein, est incapable de tirer une seule cartouche. Comme dit la maxime, « celui qui veut aller loin, ménage sa monture ».

On pourra me rétorquer que ce n’est pas la faute desenseignants si la grève s’éternise ; que c’est à cause de la surdité et de la cécité de l’État que cette situation perdure ; que, donc, maintenant, si nous n’avons plus de carte à jouer pour protester contre la barbarie des policiers et policières, c’est justement parce que l’État nous a poussé à jouer toutes nos cartes et qu’ilne nous reste plus rien sinon notre audace de dénoncer dans les médias traditionnels et publier des postes exprimant notre colère en compatissant avec le collègue victime sur les réseaux sociaux.

Tandis que si nous n’avions pas été déjà en grève semestrielle, nous aurions pu amplifier notre rage contre ce voyou qui a osé souffleter un enseignant, un agent éducatif qui revendique ses droits. Car, la rage, cette grande force, est en même temps notre droit et notre justice. Aujourdui, les portes de toutes les écoles, publiques et privés, auraient été fermées jusqu’à l’arrestation et le jugement des bourreaux, mais fauted’une attitude plus responsable et d’un usage plus modéré de notre force, nous ne pouvons rien faire de consistant en faveur du rétablissement de la dignité de notre collègue humilié de manière si spectaculaire.

C’est dommage. Cela devrait nous servir de leçons à la longue. La grève est trop précieuse pour en faire un usage démesuré. Ainsi, par manque de créativité, de tempérance et de modération, nous voilà coincés entre l’enclume et le marteau, abasourdis par le bruit du silence assourdissant de notre propre grève sans trêve à quelques semaines de la clôture de l’année scolaire 2024-2025.
 
Jean Willy Belfleur,
Normalien Supérieur,
Censeur de l’Ouest.

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