Par Jean Wesley Pierre
Port-au-Prince, le 18 octobre 2025 — À l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le cancer du sein, le Conseiller-Président Louis Gérald Gilles a pris part, jeudi 16 octobre, à une cérémonie officielle organisée dans les locaux du ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP), à Maïs Gâté.
L’événement s’est déroulé en présence du Dr Oscar Barreneche, représentant de l’OPS/OMS en Haïti, ainsi que de plusieurs membres du corps diplomatique, traduisant la portée internationale de la cause.
Dans un pays où l’accès aux soins de santé demeure inégal et souvent hors de portée des plus vulnérables, cette commémoration n’était pas qu’un rituel symbolique : elle s’est voulue un moment d’engagement, de prise de conscience et de promesse d’action.
Le cancer du sein, une réalité qui frappe fort en Haïti
Le cancer du sein reste l’un des plus grands fléaux de santé publique en Haïti. Selon les estimations des organismes internationaux, il figure parmi les principales causes de mortalité féminine dans le pays, souvent diagnostiqué à un stade avancé faute d’équipements adéquats, de dépistage précoce et de sensibilisation continue.
Derrière ces chiffres, il y a des vies : celles de mères, de sœurs, d’enseignantes, de commerçantes, de paysannes, dont la douleur silencieuse révèle les fractures du système sanitaire haïtien.
L’État se veut présent : promesse d’un centre national d’oncologie
Dans son intervention, le Conseiller-Président Louis Gérald Gilles a salué l’engagement du MSPP dans la lutte contre le cancer, en insistant sur le rôle central du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) pour faire de la santé une véritable priorité nationale.
Il a annoncé un projet porteur d’espoir : la construction d’un centre national d’oncologie dans la ville des Cayes, dont les travaux devraient débuter avant le 7 février 2026. L’acquisition du terrain est prévue dans un mois, marquant la première étape d’un chantier ambitieux censé répondre à une urgence longtemps négligée.
Un centre d’oncologie dans le Sud une région souvent marginalisée dans la distribution des infrastructures sanitaires pourrait devenir un symbole d’équité territoriale et un souffle d’espérance pour des milliers de familles contraintes aujourd’hui de se rendre à Port-au-Prince, voire à l’étranger, pour accéder à un traitement.
L’initiative s’inscrit dans un cadre plus large de coopération entre le CPT, le MSPP et les partenaires internationaux, dont l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Louis Gérald Gilles a souligné la volonté du gouvernement de doter chacun des dix départements d’un service de chimiothérapie, une mesure audacieuse dans un pays où de nombreux hôpitaux manquent encore de matériel de base.
Mais au-delà des promesses, la question reste : Haïti a-t-elle les moyens de soutenir cette ambition ?
Car construire un centre, c’est une chose ; garantir son fonctionnement durable, en est une autre. Cela suppose un investissement dans la formation du personnel médical, la maintenance des équipements, l’approvisionnement régulier en médicaments anticancéreux, et surtout une politique de santé publique fondée sur la prévention.
Entre douleur et espoir : le visage humain de la lutte
Dans les témoignages recueillis en cette date, symbole d’une grande lutte contre le cancer du sein, certaines femmes ont raconté leur parcours face à la maladie entre peur, solitude et courage.
Tasha, l’une d’elles, survivante du cancer du sein, confiait :
« Le plus dur n’était pas le traitement, c’était le silence. En Haïti, on ne parle pas assez du cancer. On a peur du mot, on a honte de la maladie. »
Ces mots rappellent que la lutte contre le cancer du sein ne se joue pas seulement dans les salles d’hôpital, mais aussi dans les mentalités. Il s’agit d’un combat culturel, éducatif et psychologique autant que médical.
La présence du Conseiller-Président à cette cérémonie revêtait donc une dimension symbolique forte : celle d’un État qui tente de reprendre le flambeau d’une santé publique en ruine, dans un contexte de crise économique et d’instabilité chronique.
Si les promesses se concrétisent, le centre d’oncologie des Cayes pourrait devenir une victoire collective contre la fatalité.
Mais si elles restent lettre morte, cette journée du 16 octobre 2025 ne sera qu’un souvenir de plus dans le long registre des promesses non tenues.
Pour l’heure, l’espoir persiste celui d’un pays où chaque femme, où qu’elle vive, puisse affronter la maladie avec dignité, soutien et soins adéquats.


