PORT-AU-PRINCE.— À quelques jours de la rentrée des classes, une question cruciale interpelle autorités, enseignants, parents et communautés locales: comment organiser le retour à l’école alors qu’un grand nombre d’établissements scolaires, notamment dans la région métropolitaine, servent encore d’abris provisoires aux familles déplacées?
Selon les données les plus récentes de la Direction de la Protection Civile (DPC), des dizaines d’écoles publiques et privées sont actuellement transformées en centres d’hébergement d’urgence.
Ces bâtiments accueillent des milliers de personnes contraintes de fuir leurs quartiers face à la fureur des gangs. Cette situation met directement en péril le bon déroulement de l’année académique 2025-2026.
Entre droit à l’éducation, droit au logement et réponse humanitaire
Pour les autorités éducatives, le dilemme est de taille: garantir aux enfants leur droit à l’éducation tout en respectant les besoins humanitaires des familles déplacées.
Du côté du Ministère de l’Éducation nationale (MENFP), des discussions sont en cours pour identifier des bâtiments alternatifs et mettre en place des horaires aménagés.
Du côté des organisations humanitaires, l’urgence reste de trouver des abris décents afin d’éviter que les enfants ne soient privés d’école pour une deuxième année consécutive.
Plusieurs pistes de solutions à envisager
Relocalisation des déplacés: transférer les familles vers d’autres sites plus adaptés, notamment des terrains publics ou des bâtiments inoccupés, avec l’appui des partenaires humanitaires.
Aménagement d’espaces temporaires d’apprentissage : installation de classes provisoires sous tentes ou structures modulaires dans les zones où les écoles restent inaccessibles.
Partenariats avec les églises et centres communautaires: afin d’accueillir temporairement des élèves, en attendant la libération des établissements scolaires.
Cependant, la mise en œuvre de ces mesures se heurte à un manque criant de ressources et à l’insécurité persistante qui complique tout déplacement des familles.
Les parents et enseignants inquiets
Du côté des parents, l’incertitude grandit. Beaucoup redoutent un nouveau report de la rentrée, déjà perturbée par l’insécurité et la crise économique. Les enfants ont déjà perdu trop de mois de cours. Si les écoles ne rouvrent pas à temps, ce sera une catastrophe.
Les enseignants, eux aussi, se disent préoccupés par leurs conditions de travail. Outre l’absence de salles de classe, beaucoup craignent pour leur sécurité dans les zones où les violences persistent.
L’urgence est de taille, voire nationale
Face à cette situation, les organisations internationales exhortent l’État haïtien à accélérer les plans de réinstallation et à garantir un accès continu à l’éducation. L’UNICEF, de son côté, rappelle que chaque jour perdu d’école fragilise davantage les enfants déjà affectés par les traumatismes liés au déplacement et à l’insécurité.
La rentrée 2025 s’annonce donc comme un test majeur de résilience pour le système éducatif haïtien. Entre l’urgence humanitaire et l’impératif scolaire, les autorités devront trouver un équilibre rapide afin que les salles de classe retrouvent leur première vocation : celle de former, protéger et offrir un avenir aux enfants du pays.
Alors que la rentrée approche, le pays se trouve face à une équation difficile : libérer les écoles sans aggraver la détresse des déplacés. Une gestion concertée et rapide apparaît indispensable pour éviter que la crise sécuritaire ne se transforme en une crise éducative aux conséquences irréversibles pour toute une génération.
Jean Mapou


