Les résultats de la classification IPC présentés par la CNSA confirment l’ampleur de la crise alimentaire en Haïti où 5,7 millions d’habitants sont en insécurité alimentaire persistante pour 2 millions en situation d’urgence. Face à une situation alarmante touchant plus de la moitié de la population, les autorités promettent une réforme en profondeur de la gouvernance alimentaire.
Ce vendredi 10 octobre 2025, on a présenté des résultats de la classification IPC (Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire), une initiative organisée par la Coordination nationale de la Sécurité alimentaire (CNSA).
Cette séance de restitution s’est déroulée en présence du Conseiller-Président Louis Gérald Gilles, du Directeur du Cabinet du Premier ministre, Axène Joseph, du ministre de l’Agriculture et des Ressources naturelles, Vernet Joseph, ainsi que des représentants de la FAO, du Programme alimentaire mondial (PAM) et de plusieurs partenaires techniques et institutionnels.
Une crise qui s’aggrave
Selon les données publiées, 5,7 millions d’Haïtiens sont actuellement en situation de crise alimentaire, dont près de 2 millions en phase d’urgence. Des chiffres qui traduisent la gravité d’une situation qui ne cesse de se détériorer depuis plusieurs années.
« Ces données ne sont pas de simples statistiques. Elles représentent des familles, des enfants, des communautés entières confrontées à la précarité et à la faim », a énoncé un communiqué de la Présidence après l’activité.
Les causes d’une insécurité alimentaire persistante
Pour Harmel Cazeau, représentant de la CNSA, la situation actuelle est le résultat d’une accumulation de facteurs défavorables.
En 2017, environ 18 % de la population haïtienne était en insécurité alimentaire. Huit ans plus tard, ce taux a presque triplé.
Pour lui, cette progression s’explique par plusieurs éléments :
La dégradation de la situation sécuritaire, qui empêcherait la circulation des produits agricoles et limite l’accès aux marchés ;
Les catastrophes naturelles répétées qui détruisent les récoltes et les infrastructures rurales ;
La crise économique surtout marquée par l’inflation, la chute du pouvoir d’achat et le chômage ;
Et la baisse de la production agricole due à l’abandon de centaines d’hectares de terres cultivables à cause de l’insécurité.
« De quoi trouver à manger reste une question sans réponse pour 5,7 millions d’Haïtiens », a souligné M. Cazeau, rappelant la mission première de la CNSA : collecter, analyser et actualiser les données sur la sécurité alimentaire au niveau des ménages et des communautés, tant en milieu rural qu’urbain, y compris dans les camps de déplacés.
Une réforme structurelle annoncée
Face à cette situation alarmante, le Conseil Présidentiel de Transition et le gouvernement ont lancé le Plan de Réparation et de Réponse aux Crises de Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle.
Ce plan vise à :
mobiliser rapidement les ressources disponibles,
assurer un suivi financier transparent,
et renforcer la gouvernance du secteur alimentaire.
Le Conseiller-Président a également annoncé la transformation de la CNSA en Office national de la Sécurité alimentaire et Nutritionnelle, une mesure destinée à garantir une coordination plus efficace et une réponse mieux adaptée aux urgences.
L’agriculture au cœur de la réponse
De son côté, le ministre de l’Agriculture, Vernet Joseph, a réaffirmé l’engagement du gouvernement à combattre les causes structurelles de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition.
Il a évoqué la perte de centaines d’hectares de terres arables en raison des violences armées et de l’abandon forcé de certaines zones de production.
Selon lui, les nouveaux travaux de cartographie et de classification entrepris par la CNSA permettront d’orienter les interventions de manière plus ciblée et efficace.
« Grâce à cette initiative, nous pourrons mieux planifier les actions et venir en aide aux zones les plus vulnérables », a déclaré le ministre, saluant au passage le soutien de la Banque mondiale et des partenaires internationaux.
Appel à la solidarité nationale
En conclusion, le Conseiller-Président Louis Gérald Gilles a lancé un appel à la responsabilité collective: « Ensemble, nous pouvons sauver des vies, protéger les moyens d’existence et renforcer la résilience alimentaire du pays. »
À travers cette initiative et cette volonté politique affirmée, Haïti tente de reprendre le contrôle de son destin alimentaire. Mais pour que ces promesses se traduisent en résultats concrets, il faudra une mobilisation durable de tous les acteurs – publics, privés et communautaires.
La rédaction


