WASHINGTON.— Alors que les États-Unis sont paralysés depuis le 1er octobre par un nouveau shutdown budgétaire, le président américain Donald Trump appelle à une réforme profonde du Sénat. Il souhaite mettre fin au «filibuster», une règle de procédure parlementaire permettant à une minorité de bloquer l’examen ou le vote d’un texte de loi. Une prise de position qui ravive les tensions entre démocrates et républicains, au moment où des milliers de fonctionnaires sont privés de salaire et où plusieurs services publics sont à l’arrêt.
L’absence d’accord au Congrès sur le budget fédéral a conduit à la suspension du financement de nombreuses agences gouvernementales. Plusieurs programmes sociaux, services administratifs et salaires publics sont gelés. Le Congressional Budget Office (CBO), un organisme indépendant, estime que cette situation pourrait coûter jusqu’à 14 milliards de dollars à l’économie américaine si elle perdure.
«Cette situation est ridicule et menace de détruire le pays», a averti Trump estimant que le blocage résulte directement d’une règle institutionnelle jugée trop contraignante: le filibuster.
Au Sénat, l’adoption d’un projet de loi requiert en théorie une majorité simple de 51 voix. Mais pour mettre fin aux débats et passer au vote, une majorité qualifiée de 60 voix est nécessaire. Cette procédure permet donc à 41 sénateurs, généralement issus de la minorité, d’empêcher l’avancement d’un texte. Utilisé par les deux partis au fil des décennies, le filibuster est devenu un outil stratégique dans les négociations politiques, forçant souvent au compromis.
Aujourd’hui, malgré leur majorité dans les deux chambres du Congrès, les républicains doivent convaincre plusieurs sénateurs démocrates pour faire adopter un budget; une condition difficile à remplir dans un contexte politique particulièrement polarisé.
Dans un message publié dans la nuit de jeudi à vendredi sur Truth Social, Donald Trump a exhorté son camp à supprimer cette règle: «Il est temps pour les républicains de jouer leur « CARTE TRUMP » et de mettre en œuvre l’Option Nucléaire, en l’occurrence se débarrasser du Filibuster, et s’en débarrasser MAINTENANT ! »
Lors de son premier mandat, l’ancien président avait déjà tenté sans succès de modifier cette procédure. Cette fois, il affirme que l’élimination du filibuster permettrait de mettre immédiatement fin au shutdown, sans préciser les contours techniques d’une telle réforme.
Plusieurs scénarios sont évoqués: abaisser le seuil de 60 voix, restreindre le filibuster à certains projets de loi, ou encore l’abolir totalement pour les questions budgétaires.
La suppression du filibuster constituerait un changement majeur dans le fonctionnement du Sénat, dont la vocation première est d’être une chambre de modération et de dialogue. De nombreux élus, y compris au sein du camp républicain, estiment qu’une telle réforme risquerait d’accentuer la polarisation et de fragiliser les contre-pouvoirs.
Pour l’heure, aucune majorité claire ne se dessine autour de cette proposition. Les discussions budgétaires restent, elles, au point mort, laissant planer l’incertitude sur la durée du shutdown et ses répercussions économiques et sociales.
Avec 20minutesfr
Jean Mapou


