En 2008, l’Organisation pour l’Unité et l’Intégration (OUI) avait lancé un appel historique à l’unité nationale. Ce jour-là, nous voulions bâtir la réconciliation entre deux forces politiques que tout semblait opposer : les Duvaliéristes et les Lavalassiens. Les deux anciens présidents, Jean-Claude Duvalier et Jean-Bertrand Aristide, avaient chacun envoyé des représentants officiels, signe que le dialogue était possible et que la volonté existait. Ce fut un moment porteur d’espoir, mais rapidement, les forces obscures ont brisé cette initiative, et l’occasion de tourner la page des divisions s’est perdue.
Pourtant, malgré les rancunes, les oppositions et les blessures, Duvaliéristes et Lavalassiens ont toujours partagé deux piliers fondamentaux : la dignité et la souveraineté d’Haïti. On a même dit que Lavalas est le fils du Duvaliérisme, car, au-delà des différences, Lavalas a hérité de ce nationalisme affirmé, de cette défense des masses populaires et de la conviction qu’Haïti doit décider seule de son destin. Les Duvaliéristes ont incarné un État fort, protecteur de ses frontières et maître de ses choix. Les Lavalassiens ont donné une voix aux plus démunis et ont porté l’idée que la République ne peut ignorer ses enfants les plus pauvres. Dans le fond, les deux ont refusé que la nation s’agenouille devant des puissances étrangères.
Malheureusement, au lieu d’unir ces forces, nous avons laissé notre égoïsme, nos querelles et nos rancunes détruire toute possibilité de rapprochement. Nous, Duvaliéristes et Lavalassiens, avons ouvert la porte à un désordre politique sans précédent, où plus de cinq cents groupuscules se proclament partis, souvent réduits au mari, à la femme et aux enfants. Ce morcellement a tué la vision nationale et affaibli notre capacité collective à diriger. Nous avons créé le vide dans lequel les gangs, les corrompus et les forces étrangères se sont engouffrés.
Aujourd’hui, notre pays est à genoux, menacé par la violence, la misère et la perte totale de contrôle. La situation est grave, mais il n’est pas trop tard. Nous devons avoir le courage de bâtir un pacte national qui réunisse les héritages du Duvaliérisme et du Lavalas. L’unité des deux grands courants peut devenir la colonne vertébrale d’une Haïti nouvelle : un État fort, capable d’imposer l’ordre, de protéger ses frontières et de garantir la sécurité, tout en restant proche de son peuple, en investissant dans l’éducation, la santé et la justice sociale.
Haïti n’a pas besoin de cinq cents partis pour avancer. Deux grands pôles politiques, porteurs de visions claires et complémentaires, entourés de quelques formations responsables, suffiraient pour offrir au peuple de vraies alternatives. Tout le reste n’est que dispersion d’énergies, gaspillage de ressources et trahison des idéaux que nous prétendons défendre.
Ceux qui se disent héritiers de Duvalier ou d’Aristide doivent comprendre que la vraie trahison n’est pas de dialoguer avec l’ancien adversaire, mais de laisser mourir la patrie par fierté mal placée. L’heure n’est plus aux divisions stériles, mais à l’unité stratégique. Si Duvaliéristes et Lavalassiens se tendent la main, la dignité et la souveraineté redeviendront le cœur battant de notre République.
Car au bout du compte, il n’y a qu’un seul drapeau, qu’une seule terre et qu’un seul peuple : le peuple haïtien. Et la débandade, le désordre, le chaos que nous vivons, c’est à nous et à nous seuls de les stopper.
Port-au-Prince, 13 août 2025
Joseph Georges DUPERVAL
Coordonnateur Général
BATON JENÈS LA