Par Jean Wesley Pierre
Port-au-Prince, 20 octobre 2025 — La fin du programme Haitian Hemispheric Opportunity Through Partnership for Encouragement (HOPE) et de la loi Haiti Economic Lift Program (HELP), arrivée à échéance fin septembre 2025 sans renouvellement par le Congrès américain, menace un secteur clé de l’économie haïtienne. Ces lois, votées en 2005 et 2010, permettaient à Haïti d’exporter des vêtements vers les États-Unis sans droits de douane. Elles représentent près de 90 % des exportations nationales.
En 2018, l’industrie manufacturière textile haïtienne employait environ 62 000 personnes. Aujourd’hui, ce chiffre est tombé à 26 000 en raison de la détérioration de la sécurité et de la fermeture d’au moins quinze manufactures. Sans le renouvellement de la loi HOPE/HELP, plus de 20 000 emplois supplémentaires pourraient disparaître, aggravant la situation économique du pays.
Des conséquences, pas seulement pour l’économie haïtienne
Les avantages de ces lois s’étendaient aussi à la République Dominicaine, où les usines de Barahona, Bonao, Guerra et Santiago produisent les tissus et les fils envoyés en Haïti pour la confection de vêtements destinés à l’exportation.
L’optimisme prudent de Fernando Capellán
L’homme d’affaires dominicain Fernando Capellán, président de la Compagnie de Développement Industriel (CODEVI), a confirmé l’expiration du programme HOPE/HELP. À la tête d’une zone franche mixte située entre Ouanaminthe et Dajabón, où travaillent près de 18 000 Haïtiens, Capellán s’est dit optimiste quant à un renouvellement de la législation dans les 90 prochains jours.
« Je suis toujours optimiste, parfois prudemment optimiste, mais je suis convaincu que les amis d’Haïti au Congrès et au sein de l’administration Trump travailleront d’arrache-pied pour prolonger de 10 ans la législation », a-t-il déclaré.
Il a ajouté que la Maison Blanche soutient le renouvellement de la loi, car ce programme « impacte non seulement les États-Unis, mais aussi leur chaîne d’approvisionnement ».
Le gouvernement haïtien tire la sonnette d’alarme
Le ministre haïtien du Commerce et de l’Industrie, James Monazard, a déclaré que « la situation dans ce secteur reste alarmante ».
Selon lui, les chefs d’entreprise du textile attendent un signal du Congrès américain concernant le renouvellement du programme.
« Si cette loi n’est pas renouvelée, cette situation pourrait entraîner la fermeture de nombreuses entreprises du secteur de la sous-traitance, l’un des piliers de l’économie haïtienne », a-t-il averti.
Le ministre a rappelé que les désaccords entre républicains et démocrates au Congrès américain ont retardé l’approbation du budget fédéral, bloquant toute décision concernant la loi HOPE/HELP. L’administration Trump devrait se prononcer sur ce renouvellement avant le 19 décembre 2025.
« L’avenir du secteur de l’externalisation en Haïti dépend en grande partie de ce renouvellement. Nous sommes optimistes, mais le temps presse », a-t-il conclu.
Entre incertitude et espoir
L’économiste Pierre-Marie Boisson estime pour sa part que la fin de la loi HOPE/HELP « n’est pas la fin », mais une période d’incertitude pour l’industrie textile. Il souligne que la question ne se limite pas au simple renouvellement de la loi, mais exige une approche plus globale.
« Le premier volet de cette approche consiste à convaincre les autorités américaines que, si elles acceptent de prolonger cette loi, il y aura un regain dans l’industrie textile », a-t-il déclaré.
Une économie sous pression
Le non-renouvellement du programme HOPE/HELP risque de fragiliser davantage une économie déjà en crise. Le secteur textile, principal pourvoyeur d’emplois formels et de devises, se retrouve dans l’attente d’une décision du Congrès américain. Entre prudence et espoir, les acteurs économiques haïtiens redoutent un effondrement du dernier pilier industriel du pays si la loi n’est pas reconduite dans les délais annoncés.


