Par Jean Wesley Pierre
Indignés par la mort du jeune influenceur Wanderson Zamy, de nombreuses personnes sont descendues dans les rues du département de l’Ouest, particulièrement à Delmas, le jeudi 21 août dernier, pour protester, réclamer justice et, du même coup, rendre un dernier hommage à celui qui faisait rire par ses contenus sur les réseaux sociaux, avant que sa vie ne soit brutalement arrachée.
Dès 10h du matin, la foule commençait déjà à se rassembler pour fouler le macadam et se rendre sur les lieux du drame, devant les locaux du Ministère de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle (MENFP). Les participants, essentiellement des jeunes, ont réclamé avec force justice en sa faveur. Wanderson Zamy a été atteint d’une blessure fatale par balle au moment où des agents de sécurité dudit ministère tentaient de disperser une manifestation d’enseignants stagiaires revendiquant leur intégration.
« Je ne le connaissais pas vraiment, ce n’était pas un ami, mais ça m’a beaucoup affecté », déclare Kervens, un jeune de 18 ans. Il poursuit en évoquant sa peur et ses angoisses face à ce phénomène. Comme le souligne Peterson Adolphe, un autre influenceur sur TikTok, « Zamy n’est pas le premier, la liste est longue ».
En effet, on se souvient de :
▪︎ Grégory Saint-Hilaire, mortellement blessé dans l’enceinte même de l’École Normale Supérieure (ENS) le 2 octobre 2020.
▪︎ Jean Félix Remonica, tué d’une balle perdue à Fontamara 27 le 1er octobre 2022.
▪︎ Jean Louis Samuel, un élève qui rentrait après les cours, tué d’une balle perdue le 24 mai 2023.
▪︎ Lebelt (Macénat) Massenat, abattu d’une balle perdue en pleine salle de classe le 11 février 2025.
La liste est longue et témoigne d’une insécurité galopante. Les jeunes, en particulier, voient chaque jour leurs frères, sœurs, camarades, collègues, ami(e)s ou conjoints succomber à cette crise qui gangrène le pays.
« Fòk nou leve kanpe, pou nou di NON », lance avec force Peterson Adolphe, exprimant sa frustration, sa peur et son ras-le-bol. « Les jeunes se sentent piégés, incompris et sans défense », ajoute un autre manifestant lors de cette marche pour réclamer justice pour Wanderson Zamy et sécurité pour toute la population.
Face à l’indignation, le MENFP a publié un communiqué annonçant avoir pris des mesures contre les agents de sécurité impliqués : quinze d’entre eux ont été suspendus et leurs armes de service remises aux autorités judiciaires.
Du côté de la Primature, le discours politique n’a pas changé. Dans un communiqué daté du 20 août 2025, son Excellence Alix Didier Fils-Aimé a écrit : « La Primature condamne avec la plus extrême fermeté cet acte barbare, indigne de notre société. » Mais aucune mention d’accompagnement concret pour la famille de Zamy n’a été faite.
Le communiqué poursuit : « Des instructions fermes ont été données pour que toute la lumière soit faite sur cet assassinat et que les auteurs soient rapidement appréhendés et traduits devant la justice. » Et encore : « Le Gouvernement, au plus haut niveau, travaille jour et nuit, avec toutes les institutions compétentes, pour rétablir la paix, renforcer la sécurité et garantir à chaque citoyenne et à chaque citoyen le droit sacré à la vie. »
Des mots qui sonnent creux pour beaucoup, alors que des déplacés de Kenscoff ou encore ceux des camps de l’ONA et de l’OPC espèrent toujours pouvoir regagner leurs foyers.
La jeunesse haïtienne, l’avenir du pays, en a ras-le-bol. Ras-le-bol de vivre dans la peur, dans l’insécurité, dans le chômage, dans le noir. Les promesses doivent cesser. Les dirigeants doivent arrêter de constater, arrêter de condamner avec des mots.
Il est temps d’agir. Il est temps de rassurer les jeunes, pour qu’aucun d’eux n’ait plus jamais à craindre de finir comme Wanderson Zamy, arraché trop tôt à la vie.