Un rapport récemment mis en lumière par la Fondation Je Klere (FJKL), basé sur des données de la Direction Centrale de la Police Judiciaire (DCPJ), jette une lumière crue sur l’implication présumée de figures politiques, institutionnelles et policières dans des activités liées à des groupes armés opérant à Port-au-Prince.
Au cœur du document : Magalie Habitant, ancienne directrice du SMCRS, est citée pour ses liens étroits avec plusieurs chefs de gangs. Des interceptions téléphoniques et des échanges WhatsApp, notamment avec un chef de gang dénommé Kempès, font état d’une transaction d’armes : vingt caisses de cartouches, estimées à 70 000 dollars, auraient été achetées avec la médiation de Prophane Victor, ex-député et ancien directeur de la douane de Belladères.
Magalie Habitant est également mentionnée dans des transactions de véhicules et marchandises volés, ainsi que dans des transferts d’argent à des groupes armés via son chauffeur, Lenès Jean Philippe. Plus troublant encore : à la demande de l’ancien président Jovenel Moïse. Elle aurait servi d’intermédiaire dans la libération contre rançon de ressortissants dominicains enlevés en 2021, avec un versement d’un million de gourdes aux ravisseurs.
Autre acteur mis en cause : Elionor Devallon, directeur de la Caisse d’Assistance Sociale (CAS). Il est accusé d’avoir autorisé un transfert de fonds à Jimmy Chérizier, alias « Barbecue », à la demande de Magalie Habitant. Bien qu’il nie avoir su à qui les fonds étaient destinés, les registres de la CAS révèlent que 28 chèques pour un total de 1 299 729 gourdes ont été encaissés par lui-même, tandis que des bénéficiaires supposés n’auraient touché que de petites sommes, parfois 1 500 gourdes. Certains noms apparaissant sur les bordereaux auraient encaissé jusqu’à 100 000 gourdes.
Le document épingle également plusieurs policiers, dont les agents Peterson Augustin, Pierre Paul Balan et l’inspecteur divisionnaire Menmnon Miguel, tous soupçonnés de trafic d’armes. Un autre, connu sous le sobriquet de « Belly », affilié au groupe armé « Team Chacha », est soupçonné d’avoir participé à l’assassinat d’un agent du Swat Team à Croix-Deprez.
Cependant, la fiabilité de certaines accusations est remise en question. Plusieurs suspects sont identifiés uniquement par des pseudonymes, sans éléments permettant leur poursuite judiciaire. Ce manque de précision fragilise le dossier et soulève des inquiétudes quant à la rigueur du travail d’enquête.
Par ailleurs, ce dossier est déféré au cabinet d’instruction et avant ce déferrement 3 gens arrêtés chez Prophane lors de son interpellation ont été libérés pour fautes de preuves leur liant au dossier.
Ce rapport, en révélant l’enchevêtrement entre réseaux politiques, institutions publiques et groupes armés, renforce le sentiment d’impunité qui gangrène la situation sécuritaire en Haïti. Il interpelle les autorités sur la nécessité d’actions claires, crédibles et transparentes pour rétablir la confiance et lutter efficacement contre les dérives internes.


